Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
15 octobre 2017 7 15 /10 /octobre /2017 22:33

La poussée à droite aux élections législatives autrichiennes du 15 octobre, avec une droite « dure » et un parti souverainiste qui pourraient former un gouvernement de coalition, est importante, non seulement pour l’Autriche, mais aussi pour l’Europe. Si cette coalition se concrétise, ce qui, pour l’heure, semble l’hypothèse la plus probable, elle pourrait servir d’exemple à d’autres pays, notamment la France.

1/ Les sondages sorties des urnes donnent l’ÖVP (droite chrétienne-démocrate) à 31%, le SPÖ (socio-démocrates) à 27% et le FPÖ (souverainiste, un peu équivalent au Front National français) à 26%. Il ne semble pas que les Verts, qui se présentaient sur deux listes séparées et rivales, les Verts proprement dits (ils auraient 3%) et des Verts dissidents, que certains commentateurs qualifient de « populistes d’extrême-gauche » (4%), puissent entrer au parlement, où seules les listes obtenant plus de 5% sont qualifiées. Rappelons que le système électoral autrichien est la proportionnelle intégrale (pondérée par cette barre de 5%, comme en Allemagne).  

Ces chiffres ne devraient pas beaucoup varier lorsque tous les bulletins seront décomptés, avec toutefois une incertitude quant à la qualification de l’une ou l’autre liste de Verts.

La participation a été forte, de l’ordre de 80%.

2/ Le gouvernement sortant était, comme en Allemagne, formé par une « grande » coalition droite-gauche. Les chances qu’elle soit reconduite sont infimes, tant les programmes de l’ÖVP et du SPÖ sont éloignés.

Une coalition ÖVP-FPÖ est davantage probable. Les deux partis ont développé des programmes électoraux assez semblables, accès sur la réduction drastique de l’accueil de nouveaux immigrants et la réduction des allocations versées à ceux qui sont déjà dans le pays.

3/ Cette question migratoire a largement dominé la campagne électorale. Elle est au centre des préoccupations des Autrichiens et il y a un rejet massif des immigrants dans l’opinion. Le pays a en effet accueilli près de 200 000 migrants (soit une proportion aussi forte qu’en Allemagne) arrivés illégalement dans le pays. Beaucoup s’accordent à estimer inassimilables ces nouveaux venus, presque tous musulmans, qui s’ajoutent à une immigration ancienne de Turcs, musulmans aussi, qui, en pratique, vivent en marge de la société autrichienne, très catholique (l’Autriche n’est pas un pays laïque et la religion catholique y est la religion de l’Etat, ce qui n’est toutefois pas en contradiction avec la liberté de culte, mais il y est difficile d’accéder aux plus hautes fonctions de l’Etat et de l’administration si l’on n’est pas enregistré comme « catholique »). Ils posent de nombreux problèmes, dans l’enseignement notamment. En outre, la délinquance et les incivilités sont plus fortes chez les immigrés musulmans que la moyenne autrichienne).

4/ Le probable futur chancelier (chef du gouvernement, poste qui a la réalité du pouvoir dans ce pays à régime parlementaire, les prérogatives du président de la République étant surtout symboliques), le chef de l’ÖVP, Sebastian Kurz, n’a que 31 ans mais n’est pas un novice en politique. Il est ministre des affaires étrangères dans le gouvernement sortant depuis 2013. En 2015, il s’est opposé frontalement à la chancelière allemande Angela Merkel sur la question des migrants. Alors que celle-ci ouvrait les portes de son pays aux migrants illégaux arrivant par la route des Balkans, l’Autriche, sous l’impulsion de Kurz, et la Hongrie de Viktor Orban fermaient les leurs.

Kurz a repris ce thème pendant la campagne et a tenu un discours très ferme.

5/ Le FPÖ, de Hanz-Christian Strache, que les commentateurs « politiquement corrects » qualifient un peu vite d’extrême-droite pour le discréditer, n’est pas, à la différence de l’AfD allemande, un nouveau venu dans la politique autrichienne. Le FPÖ est associé depuis des années aux gouvernements de certains Länder (l’Autriche est un Etat fédéral), en association le plus souvent avec la droite, mais parfois aussi avec les socio-démocrates. Il a donc l’expérience de la gestion des affaires publiques.

L’année dernière, le candidat du FPÖ a frôlé la victoire à l’élection présidentielle, avec un score de 48% au second tour.

A la différence du FN en France, le FPÖ est donc un parti qui ne fait pas peur à l’électorat et qui est considéré comme « fréquentable ». Il n’a nul besoin de se « dé-diaboliser ». Même la gauche, dans certains cas, ne rechigne pas à s’afficher avec lui. Il est vrai que les pays germaniques sont beaucoup plus consensuels que les latins…    

6/ Il faut évidemment juger les gens sur leurs actes et non sur leur discours. Il est pas impossible que le leader de la droite ait tenu un langage « dur » pour mieux siphonner les voix du FPÖ, un peu comme Sarkozy l’avait fait en 2007 avec les voix du FN.

Je me garderai donc de tout pronostic.

7/ Je me contente de relever que le vote autrichien de ce jour va dans le sens de ceux de la plupart des autres pays d’Europe Centrale, notamment la Pologne, la Hongrie, la Tchéquie et la Slovaquie. Les peuples de ces pays sont attachés à leur identité, chrétienne (Pologne, Hongrie en particulier) ou laïque (cas, en particulier de la Tchéquie, à majorité athée, ou de l’ex RDA), qu’ils considèrent incompatible avec celle des musulmans. De ces derniers, ils ne veulent pas sur leurs sols.

L’Allemagne n’est pas tout à fait sur la même longueur d’onde, mais la forte poussée de l’AfD, notamment en Allemagne de l’Est, aux législatives du 24 septembre montre qu’une part significative des Allemands réagissent comme les Autrichiens et les autres Centre-européens.

Il est trop tôt pour dire si un axe identitaire et souverainiste est en train de se constituer en Europe Centrale. Ce ne serait pas impossible tant ces peuples ont de choses en commun, à commencer par le souvenir de l’ancien empire des Habsbourg dont il reste, près d’un siècle après, une certaine nostalgie.

La Russie est une autre terre qui cultive une identité propre, appuyée sur son passé tant impérial que soviétique.

Les partisans de la mondialisation et de l’européisme dogmatiques qui nous gouvernement encore devraient réaliser que leurs penchants pour des sociétés multiculturelles au sein desquelles les identités nationales et le fondement « chrétien et de race blanche », pour reprendre les mots du général de Gaulle, sont niés, sont en contradiction avec les aspirations des peuples. Pas seulement à l’Est et au centre de l’Europe.

On ne peut préjuger qui l’emportera, des mondialistes ou des souverainistes identitaires, mais la confrontation se met en place.

L’Autriche pourrait être un exemple et un modèle, y compris pour les pays de l’Ouest de l’Europe (et au-delà).

Le soleil se lève à l’Est. Il pourrait nous apporter une lumière de nature à éclaircir l’horizon obscur qui est le nôtre depuis quelques temps.

Yves Barelli, 15 octobre 2017                                

    

Partager cet article
Repost0

Recherche