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20 juin 2018 3 20 /06 /juin /2018 23:54

Le « sommet » franco-allemand qui vient de se tenir le 19 juin près de Berlin, avait quelque chose de pathétique et de ridicule : plus l’Union européenne échoue et donne la preuve de son inutilité, pis, de sa nuisibilité, plus on en veut. Le remède est mauvais ? Au lieu d’en changer, on veut augmenter la dose ! Le malade pourra alors mourir « guéri ».  

Et pendant ce temps, l’Europe, collectivement (mais existe-t-elle autrement que négativement pour ses Etats?) et, individuellement chacun de ses pays, sont de plus en plus absents de la scène internationale. Entravés par des politiques économiques « européennes » paralysantes, frappés, sans aucune réflexion sur le problème et la manière de le résoudre, par l’afflux incontrôlé de migrants qui ne cherchent plus à s’assimiler (et s’assimiler à quoi ? On ne leur propose comme nouvelle « patrie » que des « critères » théoriques et absurdes de Maastricht !), les Etats de l’Union européenne sombrent, chacun, dans la crise.

Les peuples ne veulent plus de ce système. Ils aspirent à davantage d’identité et de sécurité, davantage de démocratie (que leurs soit disant élites mondialisées leur refusent). Leurs réponses sont encore parcellaires, hésitantes, mal coordonnées, mais il y a un espoir de vrai changement. La route sera néanmoins longue. Du chaos naitra-t-il un nouveau système ? Espérons-le, tout en reconnaissant que cet espoir aura du mal à se concrétiser.

1/ La « construction » européenne repose sur des fictions parmi lesquelles le « couple » franco-allemand est une vieille rengaine inlassablement ressassées qui a la vie dure. Ce « couple » fonctionne sur une illusion (pour les naïfs), sur une mystification (pour les calculateurs) et surtout sur une ambiguïté qui remonte à l’immédiat après-seconde guerre mondiale : les Français croyaient pouvoir diriger l’Europe en faisant travailler les Allemands pour eux (sur le tandem, la France au guidon et l’Allemagne aux pédales) et les Allemands, conscients que les effets de la guerre n’ont pas encore disparu (ils savent qu’ils continent à faire peur, et en premier lieu à eux-mêmes), ont cherché à faire passer leur « leadership » européen pour une « direction » franco-allemande.

Mais ce « couple » ne fait plus illusion. En acceptant des règles du jeu allemandes (une Europe « tout « économique », donc allemande, alors que la force de la France résidait dans le politique, le militaire et le culturel), les Français se sont condamnés à se mettre à la remorque de Berlin (et, n’ayant plus les moyens d’une politique qui se veut encore mondiale, à la remorque de Washington pour leurs interventions extérieures). Ils ont toutefois réussi (Mitterrand en son temps, parce que, désormais, ses successeurs sont devenus incapables d’imposer quoi que ce soit) à faire accepter par les Allemands la monnaie commune dont ils ne voulaient pas (le « mark » se suffisait à lui-même) et toutes les contraintes budgétaires qui vont avec (l’euro, monnaie artificielle, ne peut tenir sur le long terme qu’à coups de renflouements périodiques au grès des crises successives ; cela coûte cher, et les Allemands commencent à en avoir assez de payer pour les autres).

Désormais, tout le monde est entravé par des politiques « communes » dont on ne saisit même plus l’objet et la logique et qui, en définitive, ne profitent plus à personne.

2/ Comme d’habitude, quand on est incapable d’avancer par une politique cohérente, on invente des « gadgets » pour donner l’illusion du mouvement. Ainsi, hier dans une conférence de presse pathétique, tant elle était éloignée des réalités, Macron et Merkel (surtout le premier, Merkel, embourbée dans ses problèmes intérieurs, est restée plus discrète) ont annoncé la création d’un « budget » de la zone euro, c’est-à-dire des dépenses et des recettes spécialement affectées à des projets communs. Mais lesquels ? Incapables de le dire ? Pour quel montant ? On en discutera avec les partenaires. Bref, encore une idée sans aucune portée sur laquelle il n’y a pas vraiment d’accord. Mais, comme d’habitude, on fait semblant de s’accorder. En fait sur rien sauf sur l’illusion d’avancer ensemble.

Ce « budget » de la zone euro va s’ajouter à la déjà longue liste de gadgets coûteux et inutiles que plus personne n’est capable de comprendre. Un exemple dans un domaine qui est le mien : il existe une « ministre » des affaires étrangères européenne, des « ambassadeurs » de l’UE un peu partout, une « diplomatie » européenne formée de diplomates des pays européens détachés auprès de l’UE. Tout le monde sait que tout cela ne sert strictement à rien. Notre « ministre » européenne participe à toutes les réunions internationales où elle fait de la figuration. Quand elle parle, c’est soit pour faire le perroquet en s’alignant sur les Etats-Unis (quand il s’agit de « taper » sur Poutine ou sur Assad, elle est toujours disponible), soit pour sortir des phrases creuses (on est tous, évidement  pour la paix, pour les droits de l’homme, pour le progrès et pour l’amitié entre les peuples). Mais rien de consistant et rien de concret : logique, puisque l’Europe n’est pas un Etat et qu’elle n’a pas de politique étrangère (j’ai participé pendant trente ans à des réunions d’ambassadeurs des pays de l’UE un peu partout : après des heures de palabres, on arrivait, par exemple à New-York, à des explications de vote communes là où certains votaient oui, d’autres non et d’autres s’abstenaient. Intéressant, non ? Utile ? Je vous laisse juge. Coûteux, certainement : les « ambassades » de l’UE ont beaucoup plus de moyens, grâce à nos contributions, en hommes, voitures et matériels que n’importe quelle ambassade, les vraies, des pays membres, et dans les pays concernés, les autochtones nous demandent à quoi tout cela sert. Réponse : à rien). Je suis allé visiter une fois à Strasbourg le « bataillon » militaire franco-allemand, esquisse d’une armée européenne qui n’existera jamais. Pathétique ! Un théâtre d’ombres. 

Outre ce « budget » de la zone euro, Merkel et Macron ont aussi annoncé un lancement problématique d’une étude pour envisager de construire ensemble un char d’assaut et un avion de combat. Lesquels, quand, comment ? A vrai dire, tout le monde s’en fout. L’important n’est pas de faire ensemble (souvent jamais) mais d’annoncer qu’on va le faire. Tout sommet franco-allemand doit se terminer par des annonces. Alors, allons-y pour le char ou l’avion. La prochaine fois, on trouvera autre chose (à titre d’exemple, lorsque j’étais en poste en Pologne, on avait annoncé la création d’un centre culturel franco-allemand à Varsovie. Mais, en fait, ni les Polonais, ni les Français ni les Allemands n’en voulaient vraiment).

Ces gesticulations coûteuses se résument en un mot : la fuite en avant.

3/ Mais la vacuité du « projet » européen saute maintenant aux yeux de beaucoup. Il y en a encore beaucoup d’autres, certes, qui continuent à y croire. Certains par idéal, d’autres par simple habitude. J’en connais. Ils parlent d’une Europe idéale et idéalisée comme d’autres parlent du « Messie » qui viendra à la fin des temps sauver l’humanité. Je laisse les européistes à leur croyance. Ouvriront-ils un jour les yeux ? Les plus lucides se contentent de faire semblant d’y croire encore pour ne pas reconnaitre qu’ils s’étaient fourvoyés. Nos politiques, à commencer par Macron, et nos médias porte-voix du « système » qui continuent encore et encore à persévérer dans cette « construction » qui va droit dans le mur, et qui viennent, imperturbables, le répéter à la télévision, je les trouve personnellement pitoyables.

Il est vrai que mettre en avant « la » solution « nécessaire » européenne, c’est très pratique lorsqu’on est incapable de proposer quelque chose de cohérent. Répondre au défit migratoire ? L’Europe. Traiter le terrorisme ? L’Europe. Avoir un système de GPS indépendant de celui des Etats-Unis ? L’Europe. Et quand il fait trop froid en hiver ou trop chand en été, comme disait le général de Gaulle, ils sautent sur leur chaise comme des cabris en s’écriant « Europe, Europe, Europe ! ». Leur Europe, c’est une religion. Mais moi, je suis agnostique.   

Mais quelle Europe ? Et y a-t-il une Europe capable de faire autre chose que de préconiser les privatisations des services publics nationaux et de professer une autre philosophie économique que toujours plus de concurrence (ce qui par dogmatisme empêche des regroupements d’entreprises européennes au nom de la concurrence, alpha et oméga des politiques bruxelloises, acceptées, il faut le dire, par dogmatisme ou lâcheté, par les gouvernements)  et autre chose que toujours plus d’ouverture ?

Ma réponse est non. L’Union européenne ne peut être le cadre approprié pour trouver les réponses aux problèmes de notre continent. Pis, par son existence et son fonctionnement, elle empêche que soient trouvées les solutions dans d’autres cadres.

Or ces autres cadres existent. Ils s’appellent les cadres nationaux (ceux qui disent que la France, par exemple, est désormais trop petite pour avoir une politique nationale sont des ignorants ou des menteurs. Des pays bien plus petits dans le monde y parviennent. Exemple : la petite Corée ou la petite Suisse. Il y en a d’autres) et les coopérations bilatérales ou entre un petit nombre de pays (Airbus ou Ariane ont été fait avec une poignée de pays et en dehors de l’UE ; c’est pour cela que ça marche ; croire qu’en l’absence d’UE, ce serait la jungle est faux : des tas d’accords bilatéraux régissent les relations entre pays européens ; à titre d’exemple, les aéroports de Genève et de Bâle sont franco-suisses et ils fonctionnent très bien et bien mieux qu’en mettant en œuvre la bureaucratie bruxelloise compliquée, paralysante et coûteuse).

J’en suis personnellement venu à cette conclusion : l’Union européenne est irréformable. Elle est devenue un monstre et un carcan nuisible. Plus vite on y mettra fin, mieux on se portera. Et il est urgent de le faire car le temps commence à presser : l’Europe est déjà fortement engagée sur la voie du déclin. On peut encore la redresser, mais il faut se dépêcher et l’étape numéro un du redressement s’appelle « dissolution de l’UE ». On pourra alors organiser la coopération entre les pays européens sur des bases plus réalistes, plus saines et plus efficaces.

Je constate avec satisfaction que je suis loin d’être le seul à penser ainsi. Mais sans doute faudrait-il que nous soyons encore plus nombreux.

4/ La vérité est que de plus en plus d’esprits lucides reconnaissent que l’UE actuelle nous mène droit au mur. Le diagnostic est même en passe d’être à peu près unanimement partagé. Mais il n’y a pas encore unanimité sur les remèdes. Certains croient encore à une réforme du système pour lui permettre enfin de fonctionner. D’autres, comme moi, souhaitent passer à l’étape suivante : au-delà de la défunte UE.

L’idée de la fin de l’UE progresse. Mais il y a un jeu de poker menteur.

Certains pays restent dans l’UE par commodité parce qu’ils estiment que, l’un dans l’autre, il vaut mieux être dedans que dehors, mais ils font ce qu’ils veulent. C’est le cas de la plupart des pays d’Europe centrale qui sont désormais dans une situation confortable : il y a encore quelques mois, on parlait de sanctions contre la Pologne, accusée d’avoir adopté des lois contraires aux « valeurs » de l’UE. Désormais, on ne dit plus rien pour la bonne raison qu’on n’est plus en position de le faire.

Et puis il y a le plus gros des pays de l’UE, l’Allemagne. Nombre d’Allemands, peut-être une majorité, estiment que désormais l’UE ne leur sert plus à rien. Pis, qu’elle est contraire à leur intérêt national : leur pays a un excédent commercial, sa monnaie était autrefois forte, l’Allemagne paye pour les autres, c’est-à-dire pour le « club Med », ces pays du Sud incapables à leurs yeux de bien gérer l’économie. Les Allemands se rêvent de plus en plus en  une super-Suisse, ce pays indépendant parce que hors UE qui s’en tire très bien, preuve vivante que ça marche mieux en dehors que dedans (la Norvège est un autre exemple).

Les Allemands n’osent pas encore dire tout haut ce qu’ils pensent. Mais ils ne sont pas loin de franchir le pas.

5/ Je crois que l’UE va tomber sur la question migratoire. Parce qu’elle ne pourra pas trouver une solution « européenne ». Et parce que les peuples n’en veulent plus.

Les pays européens qui passent au « populisme » seront bientôt majoritaires : la plupart des anciens pays communistes. Mais aussi l’Autriche, la Finlande, le Danemark (on s’attend à ce que la Suède franchisse à son tour le pas) et surtout l’Italie.

Il est trop tôt pour dire si le gouvernement italien va réussir ou non. S’il échoue, les « européistes » auront encore quelques beaux jours devant eux. Mais s’il réussit, un « modèle » sera né.

Plus intéressant encore est ce qui se passe en Allemagne. Madame Merkel y est déjà affaiblie. Sa coalition est menacée d’explosion. Pas par sa gauche (là comme ailleurs, les socialistes, qui n’ont plus rien à proposer et dont la capacité de réflexion est devenue proche de zéro, se sont ralliés pieds et poings liés au système capitaliste mondialisé qu’ils prétendaient encore combattre il n’y a pas si longtemps) mais par sa droite : la CSU, parti conservateur bavarois, est en passe de rompre avec la CDU, le parti de Merkel ; son leader est le ministre de l’intérieur ; il a lancé un ultimatum à la chancelière pour qu’elle ferme les frontières. Peut-être qu’un compromis sera trouvé, mais il ne sera ni à l’avantage de la chancelière ni durable. Par ailleurs, l’AFD, parti qui conteste plus radicalement le système, progresse.

La France de Macron et l’Espagne de Sanchez, ce social-démocrate revenu presque miraculeusement (et provisoirement) au pouvoir parce que la droite en a été éjectée pour cause de corruption à grande échelle, seront bientôt les derniers à défendre encore envers et contre tout cette mythique « construction » européenne.

Macron est arrivé au pouvoir un peu par effraction. Sa chance est que son opposition est fragmentée. Par dogmatisme ou habitude, la gauche « populiste » (Mélenchon) refuse même de parler à la droite « populiste » (Le Pen) alors que leurs équivalents italiens sont dans le même gouvernement. Pis, la droite classique refuse, elle aussi, d’envisager une alliance avec le Rassemblement National de Marine Le Pen en dépit du souhait d’une partie importante de la base. L’union viendra peut-être un jour. Des gens comme Nicolas Dupont-Aignant y travaillent. Mais ce n’est pas encore mûr.

Il y a un peu partout (même si en France c’est plus compliqué et en Espagne encore hors de question) une aspiration de plus en plus forte des peuples à ce que les médias nomment péjorativement le « populisme » (ce qui en dit long, finalement, sur leur haine du peuple), mot que personnellement je revendique comme une notion positive.

Ce populisme, ce n’est pas « la peur de l’autre », comme les tenants du système disent, mais, au contraire une aspiration à quelque chose de fort et de positif et qui peut se résumer dans le triptyque « identité, sécurité, solidarité ».

J’ai eu l’occasion d’aborder un peu marginalement ce thème dans plusieurs articles de ce blog. Je me propose d’y revenir plus en détails le moment venu.

En attendant, je vous encourage à suivre l’actualité. Notre monde évolue plus vite que ce qu’on pensait il y a peu. Une nouvelle idéologie basée sur le « populisme » émerge de ci de là. Les initiatives sont encore dispersées. Les solutions qui s’esquissent manquent parfois de cohérence. Tout n’est pas nécessairement bon à prendre et sans doute faudra-t-il faire un tri. Mais n’écoutez pas les médias dans leurs appréciations débiles et leurs critiques souvent malhonnêtes. Suivez avec un regard neuf ce que disent Poutine, Trump, Orban ou Salvini. Tout n’est pas peut-être pas à retenir. Mais je crois que nous devrions nous inspirer au moins d’une partie de leurs solutions.

Ils ont en tout cas le mérite, d’abord de poser les vrais problèmes (notre « politiquement correct » refuse de le faire) et ensuite de proposer des solutions.

Cela tranche avec les inepties éculées encore ressassées par Macron et Merkel le 19 juin./.

Yves Barelli, 20 juin 2018                                                                                    

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